Yao Yang, chercheur à l’Université de Pékin, identifie dans une contribution au Project Syndicate les diverses menaces qui pèseront ces prochaines décennies sur la croissance chinoise. Il rappelle ainsi tout d’abord que les exportations vers le continent européen ont expliqué environ un neuvième de celle-ci lors de la dernière décennie. La multiplication des plans d’austérité et le ralentissement (en partie subséquent) de l’activité en Europe affecteront ainsi les exportations chinoises. Mais plus important, le resserrement monétaire opéré par les autorités chinoises, notamment afin de contrôler la surchauffe sur le marché domestique du logement, ont des conséquences immédiates sur l’économie. La déflation des prix immobiliers observée depuis peu sur l’ensemble du territoire tend à confirmer l’hypothèse d’un ralentissement généralisé de l’activité.
Plus structurellement, la Chine souffre d’insuffisantes réformes des entreprises publiques et, plus largement, de la forte implication de l’Etat dans l’économie. Ce dernier draine une forte partie du crédit bancaire pour financer les infrastructures et participe amplement au surinvestissement domestique, une situation rappelant la situation nippone au cours des années quatre-vingt. Si les politiques publiques et le versement de subventions par l’Etat ont su maintenir de hauts taux de croissance, ils sont également sources de perturbations pour l’activité économique et en particulier pour la consommation domestique. Cette dernière est passée de 67 % du PIB au milieu des années quatre-vingt-dix à 50 % ces dernières années, un déclin qui pèsera lui-même à moyen terme sur la dynamique de la croissance.
Enfin, les inégalités de revenu se sont accrues entre les différentes catégories sociales et entre les zones géographiques, une évolution préjudiciable à l’hypothétique recentrage du modèle de croissance chinois sur la demande domestique. Les disparités entre les villes et les campagnes s’observent également dans l’accès à l’éducation. La qualité de l’enseignement en zones rurales se dégrade et les dépenses éducatives pèsent sensiblement plus dans le budget des ménages ruraux que dans celui des ménages citadins, ce qui complique l’entrée des enfants d’origine rurale sur le marché du travail. 80 % des 140 millions de travailleurs migrants sont restés scolarisés moins de neuf années.
Afin que la dynamique de la croissance ne soit pas compromise, Yao Yang espère un approfondissement radical des réformes aux niveaux des gouvernements national et locaux, un renforcement des droits politiques, notamment leur diffusion aux migrants.