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19 octobre 2013 6 19 /10 /octobre /2013 11:36

L’éclatement des bulles immobilière et boursière à la fin des années quatre-vingt a ouvert une ère de stagnation économique et d'endémiques déficits budgétaires au Japon. La dette publique s’est fortement accrue, triplant en deux dernières décennies pour atteindre aujourd’hui plus de 200 % du PIB. Le Japon se singularise toutefois par l’important stock d’actifs financiers dont il dispose [Bender et alii, 2012]. Lorsque l’on prend compte ce dernier, la dette publique nette représente actuellement près de 110 % de la production (cf. graphique 1). Malgré ce ratio, les taux d’intérêt sur la dette publique japonaise se maintiennent à de faibles niveaux. D’une part, la déflation persistante contribue à stabiliser les rendements obligataires. D’autre part, plus de 90 % de la dette publique est détenue par les résidents et ceux-ci s’attendent pour l’heure à ce que la dette publique se maintienne à une trajectoire soutenable. Une forte accélération de la croissance contribuerait à stabiliser l’endettement public, mais celle-ci paraît peu probable. D'après Selo Imrohoroglu et Nao Sudo (2011), il faudrait que la croissance de la productivité globale des facteurs s’établisse à 6 % pendant au moins une décennie pour équilibrer les finances publiques, or le Japon n’a pas connu une telle performance au cours des 35 dernières années. 

GRAPHIQUE 1 Ratio dette publique nette sur RNB (en %)

japon-ratio-dette-publique-nette-RNB-hansen-2013.png

source : Hansen et Imrohoroglu (2013)

A long terme, l’économie nipponne fait en outre face à des dynamiques démographiques nuisibles à l'activité et aux finances publiques. Avec le vieillissement de la population japonaise, les dépenses de santé et les allocations retraite vont continuer à s’accroître, au moins durant les quatre prochaines décennies. Or, non seulement le vieillissement démographique alourdit les dépenses publiques, mais il affecte également les prélèvements obligatoires en réduisant la contribution des actifs et en dégradant les gains de productivité, donc la croissance potentielle.

GRAPHIQUE 2  Les ratios de dépendance (en %)

japon-ratios-de-dependance-hansen-2013.png

source : Hansen et Imrohoroglu (2013)

Le premier ratio de dépendance (rapportant le nombre de personnes de plus de 65 ans sur le nombre de personnes ayant entre 20 et 64 ans) implique qu’environ trois actifs prennent aujourd’hui en charge un retraité ; dans 60 ans, un retraité sera pris en charge par quasiment un seul actif (cf. graphique 2). Même si l’âge de départ à la retraite était retardé, les conditions de financement du système de retraite se dégraderaient fortement. En effet, le second ratio de dépendance (rapportant le nombre de personnes de plus de 70 ans sur le nombre de personnes ayant entre 20 à 69 ans) va aussi continuer à fortement agmenter. 

Pour assurer sa solvabilité budgétaire, l’Etat japonais a déjà programmé plusieurs hausses du taux de TVA. Celle-ci devrait passer de 5 % aujourd’hui à 10 % en octobre 2015. Gary Hansen et Selo Imrohoroglu (2013) utilisent un modèle de croissance néoclassique pour estimer l’effort budgétaire qui serait nécessaire pour stabiliser le ratio d’endettement. Celui-ci représenterait 30 à 40 % des dépenses de consommation. Pour l’obtenir, les taux de taxation devraient atteindre jusqu’à 60 %. Ce chiffre serait ramené à 40 % si le gouvernement élargissait l’assiette fiscale. Les hausses programmées du taux de TVA se révèlent donc dramatiquement insuffisantes pour équilibrer les finances publiques. L’ampleur de l’effort budgétaire amène par conséquent Hansen et Imrohoroglu à préconiser l’adoption de mesures supplémentaires telles que le développement des flux d’immigration ou le relèvement du taux d’activité des femmes.

 

Références

ARTUS, Patrick (2013), « Comment le Japon peut-il restaurer sa solvabilité budgétaire ? », Natixis, Flash économie, n° 712, 11 octobre.

BRENDER, Anton, Florence PISANI et Emile GAGNA (2012), La Crise des dettes souveraines, collection « Repères », La Découverte.

HANSEN, Gary, & Selo IMROHOROGLU (2013), « Fiscal reform and government debt in Japan: A neoclassical perspective », NBER Working Paper, n° 19431, septembre.

IMROHOROGLU, Selo, & Nao SUDO (2011), « Will a growth miracle reduce debt in Japan? », in The Economic Review, (Keizai Kenkyuu, Institute of Economic Research, Hitotsubashi University), vol. 62, n° 1.

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commentaires

N
Le Japon s'est lui même embourbé dans un pétrin dont il ne pourra jamais se remettre.
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