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2 juillet 2012 1 02 /07 /juillet /2012 15:23

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La décomposition internationale du processus productif est un élément essentiel de l’économie internationale moderne. Puisque chaque segment d’un produit peut être fabriqué séparément des autres, les entreprises fractionnent les étapes de production nécessaires à une production donnée et de les distribuer entre différents pays pour minimiser les coûts de production. Les firmes transnationales ont activement profité de la spécialisation verticale des pays en arbitrant entre les lieux possibles de chaque segment de leur chaîne de valeur. Apple a ainsi conçu son iPhone en Californie, mais le produit est physiquement assemblé en Chine, à partir de pièces provenant du monde entier, en particulier des autres pays du sud-est asiatique. Avec la baisse des coûts de transaction et l’approfondissement subséquent de la fragmentation de la production, les échanges de biens intermédiaires (pièces détachées, composantes, etc.) utilisés comme consommations intermédiaires ont pris une place croissante dans le commerce internationale au cours des dernières décennies.

Or les comptes nationaux ne collectent que les données relatives aux flux bruts aux frontières et non celles aux lieux sur lesquels la valeur est ajoutée aux différentes étapes du processus de production. Si une telle mesure s’avérait approprié pour une époque où les échanges de biens finis correspondent à l’essentiel du commerce international, elle apparaît inadéquate lorsque les échanges de biens intermédiaires en constituent une composante majeure. Il apparaît ainsi difficile de mesurer systématiquement la décomposition des processus productifs pour plusieurs pays sur de longues périodes.


Robert C. Johnson et Guillermo Noguera (2012) ont collecté des données relatives au commerce, à la production et aux usage d’intrants au niveau sectoriel sur la période s’étendant de 1970 à 2009. Ils obtiennent des tableaux entrées-sorties synthétiques pour chaque année et suivent à travers ceux-ci les expéditions de biens intermédiaires et finaux entre les pays. Ils peuvent ainsi capturer les chaînes de valeur complexes impliquant plusieurs pays, à l'intar de la fabrication de l’iPhone. Les auteurs identifient le contenu en valeur ajoutée du commerce bilatéral au cours des quatre décennies en suivant la valeur ajoutée depuis le lieu sur lequel elle est produite jusqu’au lieu où elle est absorbée en demande finale.

Au niveau mondial, le ratio de la valeur ajoutée sur les exportations brutes a diminué de 10 à 15 points de pourcentage au cours des quatre décennies. Plus précisément, il diminue durant les années soixante-dix, reste stable la décennie suivante, puis chute fortement lors des années quatre-vingt-dix. Le déclin est trois fois plus rapide après 1990 que sur la période précédente. L’ampleur et la chronologie des déclins de ratios diffèrent selon les pays. Le déclin médian est d’environ 16 points de pourcentage. Ces variations sont plus prononcées pour les économies à forte croissance subissant une transformation structurelle, mais aussi pour quelques économies avancées telles que l’Allemagne. L’industrie constitue en outre le secteur ayant le plus approfondi le processus de production.

Johnson et Noguera observent ensuite l’influence des coûts de transaction sur la dynamique de la fragmentation. La distance joue un rôle majeur parmi les barrières à l’échange non tarifaires. Les ratios bilatéraux de la valeur ajoutée sur les exportations brutes sont particulièrement élevés pour les partenaires à l’échange distants : en moyenne les exportations en valeur ajoutée « voyagent plus loin » que les exportations brutes. Les couples de pays partageant un langage commun ou une origine coloniale présentent également des ratios plus faibles. Les variations des ratios de la valeur ajoutée sur les exportations brute au cours du temps sont liées aux évolutions de distance. Les déclins dans les ratios sont plus accentués pour les partenaires commerciaux spatialement proches. Au cours du temps, le commerce brut et le commerce en valeur ajoutée deviennent plus sensibles à la distance ; le commerce brut réagit en l’occurrence plus fortement à la distance que le commerce en valeur ajoutée.

Les accords commerciaux régionaux influencent puissamment les ratios bilatéraux de la valeur ajoutée sur les exportations brutes. Ils tendent à stimuler le commerce en valeur ajoutée, mais surtout le commerce brut. Les accords commerciaux approfondis, notamment ceux relatifs aux marchés communs et aux unions économiques, influencent plus amplement la fragmentation que les accords préférentiels ou de libre échange. Les politiques commerciales ont ainsi un rôle majeur dans la dynamique de fragmentation.


Références  Martin ANOTA

JOHNSON, Robert C., & Guillermo NOGUERA (2012), « Fragmentation and trade in value added over four decades », NBER working paper, n° 18186, juin.

MOATI, Philippe, & El Mouhoub MOUHOUD (2005), « Décomposition internationale des processus productifs, polarisations et division cognitive du travail », in Revue d'Economie politique, n° 5, décembre.

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<br /> Voir Blog(fermaton.over-blog.com)No.20 - THÉORÈME des BULLES. - Processus Dynamiques.<br />
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