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15 janvier 2022 6 15 /01 /janvier /2022 21:42
Jón Steinsson et Emi Nakamura (crédit : Hagit Caspi)

Jón Steinsson et Emi Nakamura (crédit : Hagit Caspi)

Nul autre champ de la science économique ne semble susciter autant de controverses, notamment de la part de ses propres praticiens, que la macroéconomie [Coyle et Haldane, 2014 ; Korinek, 2015 ; Romer, 2016 ; Stiglitz, 2018]. Les critiques se sont notamment cristallisées sur l’essor des modèles DSGE, accusés d’avoir contribué à entraîner une complexification mathématique abusive des travaux, une focalisation excessive sur la cohérence interne des modèles au détriment de leur cohérence externe, l’adoption d’hypothèses irréalistes, une négligence de la sphère financière, etc., des dérives qui ont peut-être rendu la profession bien peu présentable lorsque la crise financière mondiale éclata en 2008 [Hoover, 2021]

Dans un exercice qu’ils veulent avant tout descriptif, Philip Glandon, Kenneth Kuttner, Sandeep Mazumder et Caleb Stroup (2022) ont précisément cherché à retracer l'évolution de la recherche macroéconomique, du moins celle publiée par les revues les plus prestigieuses de la discipline. Ils ont étudié 1.894 articles parus depuis 1980 dans cinq revues spécialisées (le Journal of Monetary Economics, le Journal of Economic Dynamics and Control, le Journal of Money, Credit and Banking, l'American Economic Journal: Macroeconomics et la Review of Economic Dynamics) et cinq revues généralistes (l’American Economic Review, Econometrica, le Journal of Political Economy, le Quarterly Journal of Economics et la Review of Economic Studies). Pour chaque article, ils ont collecté des données relatives à plusieurs de ses caractéristiques, notamment les objectifs de recherche qu’il poursuit et la méthodologie à laquelle il a recours.

Au terme de leur analyse, Glandon et ses coauteurs se disent aller dans le sens de Ricardo Reis (2018), pour lequel la macroéconomie constitue un champ « varié » et « vibrant », ne se résumant pas à une « modélisation DSGE sans âme ». Mais ils mettent toutefois bien en évidence un mouvement de convergence vers une approche commune pour la recherche appliquée. 

Leur analyse confirme qu’au cours des quatre dernières décennies la recherche macroéconomique s’est de plus en plus focalisée sur la théorie (cf. graphique 1). En effet, la modélisation formelle, recourant désormais quasi systématiquement aux microfondations, tient une place centrale dans 70 % des articles publiés entre 2016 et 2018 ; les articles n’incorporant pas un passage substantiel de théorie formelle s’avèrent particulièrement rares.

GRAPHIQUE 1  Répartition des publications selon leur méthodologie (en %)

Comment la recherche macroéconomique a évolué ces quarante dernières années

source : Glandon et alii (2022)

Ensuite, non seulement la théorie formelle a pris une place de plus en plus importante dans les publications, mais elle fait preuve en outre d’une complexité croissante, permise notamment par l’explosion de la puissance de calcul [Sergi, 2015]. La part des travaux recourant à des modèles d’équilibre général et, surtout, à des modèles d’équilibre partiel a diminué, les macroéconomistes s'appuyant de plus en plus fréquemment sur les modèles DSGE. Parmi eux, c’est le recours à des modèles à agent représentatif qui domine largement, mais les modèles à agent hétérogène sont de plus en plus répandus et ils représentent désormais un tiers d’entre eux. Glandon et ses coauteurs soulignent bien que, si la modélisation DSGE est devenue le cadre de modélisation privilégié, elle n’a pas pour autant fait disparaître les autres formes de modélisation : comme le concluait Olivier Blanchard (2009, 2017), ces dernières ont toujours leur place en macroéconomie.

GRAPHIQUE 2  Répartition des publications centrées sur la théorie selon la nature de l’équilibre (en %)

Comment la recherche macroéconomique a évolué ces quarante dernières années

source : Glandon et alii (2022)

Ce recentrage de la recherche vers la théorie formelle s’est accompagné d’un moindre usage des méthodes économétriques en vue de tester les hypothèses : seulement 10 % des articles publiés entre 2016 et 2018 ont cherché soit à corroborer, soit à rejeter une théorie. Par contre, depuis 1990, les travaux ont de plus en plus cherché à estimer les variables de leur modèle à partir des données empiriques. En l’occurrence, leurs concepteurs cherchent à construire des modèles mimant certains aspects des données. En outre, beaucoup de publications utilisent de telles méthodes d’estimation pour juger des effets des politiques macroéconomiques à partir de leur modèle quantitatif.

Le fait que les macroéconomistes cherchent moins à tester les hypothèses économiques marque un profond changement par rapport à l’agenda même proposé par Robert Lucas et Thomas Sargent (1979) : ces derniers appelaient à une « théorie d’équilibre du cycle d’affaires » qui soit « économétriquement testable ». C’est l’essor des modèles DSGE dans les années 1990 et, avec elle, de la méthodologie d'Edward Prescott (1986), donnant la primauté à « la théorie sur la mesure », qui amène les macroéconomistes à moins chercher à tester leurs hypothèses. Mais pour Glandon et ses coauteurs, ce mouvement s’explique peut-être plus fondamentalement par les difficultés qu’il y a à tester empiriquement les hypothèses à partir de données macroéconomiques [Summers, 1991].

GRAPHIQUE 3  Proportion des publications incorporant des imperfections financières parmi celles centrées sur la théorie (en %)

Comment la recherche macroéconomique a évolué ces quarante dernières années

source : Glandon et alii (2022)

En poursuivant leur analyse, ils notent ensuite que les publications ont fréquemment recours aux imperfections de marché ; les modèles sans friction, où les marchés sont parfaitement concurrentiels, sont devenus de plus en plus rares. En l’occurrence, Glandon et ses coauteurs rejettent l’idée selon laquelle les publications ignoraient les imperfections financières avant qu’éclate la crise financière mondiale en 2008 (cf. graphique 3). Cela dit, l’intérêt pour les imperfections sur les marchés financiers a toutefois eu tendance à s’émousser dans les années 1980 et il ne s'est vraiment ravivé qu'avec la crise financière mondiale : le nombre de publications intégrant des frictions financières a fortement augmenté au cours de la dernière décennie. Presque la moitié des articles publiés entre 2016 et 2018 prennent en compte le secteur financier dans leur modélisation et/ou incluent des frictions financières.

Glandon et ses coauteurs notent également que les méthodes sur séries temporelles, populaires dans les années 1980 et 1990, ont de moins en moins été utilisées. Parallèlement, les publications macroéconomiques ont eu tendance à délaisser les séries temporelles agrégées pour recourir aux données microéconomiques, à l’image de ce que font notamment Emi Nakamura, Jón Steinsson, Atif Mian et Amir Sufi. Pour Glandon et ses coauteurs, cette utilisation croissante des méthodes de microéconomie appliquée et de données microéconomiques semble s’inscrire dans la « révolution de la crédibilité » évoquée par Angrist et Pischke (2010). Là aussi, ce mouvement s’explique notamment par les difficultés à tester empiriquement les hypothèses à partir de données macroéconomiques, si bien que l'on peut y voir un progrès pour la discipline.

 

Références

ANGRIST, Joshua, & Jörn-Steffen PISCHKE (2010), « The credibility revolution in empirical economics: How better research design is taking the con out of econometrics », in Journal of Economic Perspectives, vol. 24, n° 2.

BLANCHARD, Olivier (2009), « The state of macro », in Annual Review of Economics, vol. 1, n° 1.

BLANCHARD, Olivier J. (2017), « On the need for (at least) five classes of macro models », in PIIE, Realtime Economic Issues Watch (blog), 10 avril.

COYLE, Diane, & Andrew HALDANE (2014), « Financial crash: What’s wrong with economics? », in Prospect, 9 décembre.  

GLANDON, Philip J., Kenneth KUTTNER, Sandeep MAZUMDER& Caleb STROUP (2022), « Macroeconomic research, present and past », NBER, working paper, n° 29628.

HOOVER, Kevin D. (2021), « The struggle for the soul of economics », Center for the History of Political Economy, working paper, n° 2021-04.

KORINEK, Anton (2015), « Thoughts on DSGE macroeconomics: Matching the moment, but missing the point? ».

LUCAS, Jr., Robert E., & Thomas J. SARGENT (1979), « After Keynesian macroeconomics », in After the Phillips Curve: The Persistence of High Inflation and High Unemployment.

PRESCOTT, Edward C. (1986), « Theory ahead of business cycle measurement », in Federal Reserve Bank of Minneapolis Quarterly Review, vol. 10, n° 4.

ROMER, Paul (2016), « The trouble with macroeconomics ».

SERGI, Francesco (2015), « L’histoire (faussement) naïve des modèles DSGE ».

STIGLITZ, Joseph E. (2018), « Where modern macroeconomics went wrong », in Oxford Review of Economic Policy, vol. 34, n° 1-2.

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2 janvier 2022 7 02 /01 /janvier /2022 09:00
Un niveau élevé de dette publique nuit-il vraiment à la croissance ?

Avec la contraction de l’activité économique provoquée par la pandémie et les mesures sanitaires, d’une part, et l’adoption d’amples mesures de soutien budgétaire, d’autre part, les dettes publiques se sont retrouvées à des niveaux exceptionnellement élevés (cf. graphique 1) [Kose et alii, 2022]. Il y a un peu plus d’une décennie, la crise financière mondiale avait déjà entraîné une forte hausse des ratios dette publique sur PIB dans les pays développés. Les gouvernements avaient alors rapidement stoppé leur relance budgétaire et adopté des plans d’austérité pour assainir leurs finances. Aujourd’hui, beaucoup expriment de nouveau leurs inquiétudes quant à la soutenabilité des dettes publiques. Une fois la pandémie derrière nous, il ne serait guère étonnant que les gouvernements entreprennent une nouvelle consolidation budgétaire.

GRAPHIQUE 1  Dette publique nette dans une sélection de pays (en % du PIB)

Un niveau élevé de dette publique nuit-il vraiment à la croissance ?

source : FMI

Mais si le niveau élevé de la dette publique inquiète, ce n’est pas seulement en alimentant les peurs d’un défaut de paiement de l’Etat ; c’est notamment parce qu’il est soupçonné de nuire à l’activité économique. C’est cette crainte qu’avait confortée le travail séminal de Carmen Reinhart et Kenneth Rogoff (2010) : en observant une vingtaine de pays développés, ils avaient conclu que des dettes publiques supérieures à 90 % du PIB étaient associées à une moindre croissance économique. Plusieurs travaux ont depuis affirmé qu’il existait effectivement un lien négatif entre les ratios de dette publique et le PIB (Woo et Kumar, 2015; Chudik et alii, 2017), du moins lorsque le niveau de dette publique dépassait un seuil autour de 90 % du PIB (Cecchetti et alii, 2011 ; Checherita-Westphal et Rother, 2012 ; Baum et alii, 2013).

On peut imaginer plusieurs canaux via lesquels un niveau élevé de dette publique pourrait déprimer l’activité économique. Tout d’abord, l’endettement public pourrait entraîner un effet d’éviction (crowding-out). En effet, comme les titres privés sont perçus comme sûrs, les épargnants et les institutions financières risquent de se détourner des titres émis par les entreprises privées lorsque l’Etat emprunte. Pouvant plus difficilement financer leurs investissements, les firmes réduiraient ceux-ci [Huang et alii, 2018]. Ensuite, les ménages pourraient adopter des comportements ricardiens : si le niveau de dette publique est élevé, ils peuvent redouter que le gouvernement finisse par augmenter significativement les impôts pour rembourser sa dette, si bien qu’ils pourraient chercher à davantage épargner dans la période courante. En outre, le fait même que les marchés financiers et les sociétés financières soient moins convaincus de la soutenabilité de la dette publique pourrait conduire à un durcissement des conditions de financement pour l’ensemble des agents.

En raison de ces divers effets pervers, une relance budgétaire pourrait perdre en efficacité du fait même qu’elle alourdit la dette publique [Huidrom et alii, 2016]. Réciproquement, dans la mesure où elle réduit (a priori) l’endettement public, l’austérité budgétaire pourrait en définitive avoir des effets bénéfiques sur l’activité économique, comme l’a suggéré à plusieurs reprises Alberto Alesina dans ses travaux. L’étude de Reinhart et Rogoff a pu ainsi être mobilisée au sortir de la crise financière mondiale pour plaider en faveur de la consolidation budgétaire [Konzelmann, 2014].

Mais il ne faut pas non plus négliger les effets bénéfiques que peut avoir un accroissement de la dette publique [Fatás et alii, 2019]. Celui-ci peut directement financer un investissement productif, notamment des dépenses d’infrastructures, ce qui stimule le potentiel de croissance à long terme ; il peut rendre la croissance plus soutenable, par exemple en permettant de financer la transition vers une économie à bas carbone ; il peut financer l’adoption de plans de relance et permettre ainsi au gouvernement de stabiliser l’activité économique, etc. Il est en l’occurrence peu probable que l’endettement public entraîne un effet d’éviction lors d’une récession, dans la mesure où l’ensemble du secteur privé cherche alors à épargner et où les entreprises sont en conséquence peu incitées à investir. En fait, en adoptant un plan de relance lors d’une récession et en finançant celui-ci par endettement, un gouvernement ne soutient pas seulement directement l'activité en stimulant la demande globale ; il la soutient également en fournissant au secteur privé les actifs sûrs dont il a alors éperdument besoin.

Plusieurs analyses ont estimé que l’effet causal allant d’un accroissement de la dette publique à la croissance économique était au mieux fragile (Panizza et Presbitero, 2014 ; Ash et alii, 2020). Si des ratios dette publique sur PIB élevés sont effectivement corrélés à une plus faible croissance, cela ne veut pas forcément dire qu’une hausse de la dette publique pèse sur l’activité économique : corrélation ne signifie pas causalité. Et s’il y a un lien de causalité, celui-ci peut aller en sens inverse : une faible croissance tend mécaniquement à détériorer les finances publiques, notamment en érodant les recettes fiscales.

Une corrélation peut aussi s’expliquer par la présence de facteurs confondants : en l’occurrence ici, des facteurs sont susceptibles d’affecter simultanément l’endettement public et la croissance économique. Par exemple, des niveaux élevés de dette publique peuvent amener les gouvernements à adopter des plans d’austérité, par exemple parce qu’ils craignent que leur dette soit insoutenable ou parce qu’ils ne parviennent plus à emprunter sur les marchés obligataires, si ce n’est à des taux d’intérêt prohibitifs. Or non seulement l’austérité budgétaire nuit à l’activité économique à court terme, mais elle peut détériorer le potentiel de croissance à long terme [Fatás et Summers, 2017]. Du fait de ses effets négatifs sur l’activité économique, elle peut même se révéler en définitive contre-productive en conduisant à une nouvelle hausse du ratio dette publique sur PIB, comme cela semble avoir été le cas dans certains pays de la zone euro cette dernière décennie [House et alii, 2017]. De même, de mauvaises institutions politiques peuvent à la fois détériorer les finances publiques et la croissance économique. Dans tous les cas, l’existence de facteurs confondants crée un problème d’endogénéité qui complique la tâche des économètres cherchant à déterminer l’impact de la dette publique sur la croissance.  

En outre, plusieurs travaux empiriques concluent qu’il n’y a guère de seuil uniforme pour l’ensemble des pays à partir duquel une hausse du ratio dette publique sur PIB est associée à une moindre croissance (Pescatori et alii, 2014 ; Eberhardt et Presbitero, 2015 ; Egert, 2015a ; Egert, 2015b ; Chudik et alii, 2017 ; Eberhardt, 2019 ; Ash et alii, 2020).

Passant en revue la littérature développée autour du lien entre endettement public et croissance économique, Philipp Heimberger (2021) a réalisé une méta-analyse à partir de 826 estimations tirées de 48 études. La moyenne non pondérée des résultats recensés suggère qu’une hausse de 10 points de pourcentage du ratio dette publique sur PIB est associée à une baisse de 0,14 point de pourcentage de la croissance annuelle (cf. graphique 2). L’intervalle de confiance à 95 % va de 0,10 à 0,18 point de pourcentage.

GRAPHIQUE 2  Coefficients standardisés des estimations dette publique-croissance économique

Un niveau élevé de dette publique nuit-il vraiment à la croissance ?

source : Heimberger (2021)

La répartition des estimations est toutefois très allongée : la littérature a abouti à des estimations très hétérogènes. La répartition des estimations est également très asymétrique. En creusant davantage, Heimberger conclut que les publications tendent à surreprésenter les estimations suggérant un impact linéaire négatif de l’accroissement du ratio d’endettement public sur la croissance. Une fois ce biais de publication corrigé, il conclut que l’hypothèse d’un effet moyen nul de la dette publique sur la croissance ne peut être rejetée. En outre, il note que la prise en compte de l’endogénéité entre dette publique et croissance rend les estimations moins tournées vers le négatif. 

GRAPHIQUE 3  Estimations de seuils du ratio dette publique sur PIB au-delà duquel la croissance est réduite

Un niveau élevé de dette publique nuit-il vraiment à la croissance ?

source : Heimberger (2021)

Heimberger considère ensuite l’éventualité d’une non-linéarité dans la relation entre ratio d’endettement public et croissance économique. Au terme de sa méta-analyse, il conclut qu’il n’y a pas d’éléments empiriques robustes suggérant l’existence d’un seuil universel à partir duquel la hausse du ratio dette publique sur PIB est associée à une chute de la croissance. Les estimations de seuils sont en effet très hétérogènes : elles vont de 8,4 % à 147,5 % du PIB (cf. graphique 3). Celles suggérant un seuil autour de 90 % sont notamment sensibles à des données ou choix méthodologiques particuliers. En définitive, il y a peut-être des non-linéarités dans la relation entre dette publique et croissance, mais celles-ci sont propres aux pays et elles sont bien plus complexes que ce que beaucoup ont pu suggérer.

 

Références

ASH, Michael, Deepankar BASU & Arindrajit DUBE (2020), « Public debt and growth: An assessment of key findings on causality and thresholds », University of Massachusetts Amherst, working paper, n° 433.

BAUM, Anja, Cristina CHECHERITA-WESTPHAL & Philipp ROTHER (2013), « Debt and growth: New evidence for the euro area », in Journal of International Money and Finance, vol. 32.

CECCHETTI, Stephen G., Madhusudan MOHANTY & Fabrizio ZAMPOLLI (2011), « The real effects of debt », BRI, working paper, n° 352.

CHECHERITA-WESTPHAL, Cristina, & Philipp ROTHER (2012), « The impact of high government debt on economic growth and its channels: an empirical investigation for the euro area », in European Economic Review, vol. 56, n° 7.

CHUDIK, Alexander, Kamiar MOHADDES, M. Hashem PESARAN & Mehdi RAISSI (2017), « Is there a debt-threshold effect on output growth? », in Review of Economics and Statistics, vol. 99, n° 1.

EBERHARDT, Markus, & Andrea F. PRESBITERO (2015), « Public debt and growth: Heterogeneity and non-linearity », in Journal of International Economics, vol. 97, n° 1.

EBERHARDT, Markus (2019), « Nonlinearities in the relationship between debt and growth: (No) evidence from over two centuries », in Macroeconomics Dynamics, vol. 23, n° 4.

EGERT, Balázs (2015a), « Public debt, economic growth and nonlinear effects: Myth or reality? », in Journal of Macroeconomics, vol. 43.

EGERT, Balázs (2015b), « The 90% public debt threshold: the rise and fall of a stylized fact », in Applied Economics, vol. 47.

FATÁS, Antonio, Atish R. GHOSH, Ugo PANIZZA & Andrea F. PRESBITERO (2019), « The motives to borrow », FMI, working paper, n° 19/101.

FATÁS, Antonio, & Lawrence H. SUMMERS (2017), « The permanent effects of fiscal consolidations », in Journal of International Economics.

HEIMBERGER, Philipp (2021), « Do higher public debt levels reduce economic growth? », Hans-Böckler-Stiftung, FMM, working paper, n° 74. 

HOUSE, Christopher L., Christian PROEBSTING & Linda L. TESAR (2017), « Austerity in the aftermath of the Great Recession », NBER, working paper, n° 23147.

HUANG, Yi, Ugo PANIZZA & Richard VARGHESE (2018), « Does public debt crowd out corporate investment? International evidence », CEPR, discussion paper, n° 12931.

HUIDROM, Raju, M. Ayhan KOSE, Jamus J. LIM & Franziska L. OHNSORGE (2016), « Do fiscal multipliers depend on fiscal positions? », CAMA, working paper, n° 35/2016, juin.

KONZELMANN, Suzanne (2014), « The political economics of austerity », in Cambridge Journal of Economics, vol. 38, n° 4.

KOSE, M. Ayhan, Franziska OHNSORGE, Carmen REINHART & Kenneth ROGOFF (2022), « The aftermath of debt surges », in Annual Review of Economics.

PANIZZA, Ugo, & Andrea F PRESBITERO (2014), « Public debt and economic growth: Is there a causal effect? », in Journal of Macroeconomics, 41.

PESCATORI, Andrea, Damiano SANDRI & John SIMON (2014), « Debt and growth: Is there a magic threshold? », FMI, working paper, n° 14/34.

REINHART, Carmen M., & Kenneth S. ROGOFF (2010), « Growth in a time of debt », in American Economic Review: Papers & Proceedings, vol. 100, n° 2.

WOO, Jaejoon, & Manmohan S. KUMAR (2015), « Public debt and growth », in Economica, vol. 82.

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21 décembre 2021 2 21 /12 /décembre /2021 11:18
Le système de change en ce début de vingt-et-unième siècle

Ethan Ilzetzki, Carmen Reinhart et Kenneth Rogoff (2021b) sont revenus sur les évolutions du système de change mondial observées depuis le tournant du siècle. Ils estiment que les événements et la recherche économique de ces deux dernières décennies ont fait émerger un nouveau consensus en matière de change. 

Tout d’abord, malgré le déclin de la part de l’économie américaine dans l’économie mondiale, le dollar américain apparaît encore plus central au système financier international, que ce soit en tant qu’unité de compte ou intermédiaire des échanges qu’en tant de réserve de valeur. En l’occurrence, le dollar reste la principale devise d’ancrage : la part des pays, pondérés ou non selon leur PIB, ayant ancré leur monnaie sur le dollar a régulièrement augmenté pour revenir au niveau atteint au summum de Bretton Woods. Une part significative des règlements des échanges commerciaux, des émissions d’obligations privées et des actifs sûrs est libellée en dollars et la monnaie américaine constitue le principal actif dans les réserves de change des banques centrales : les actifs en dollars représentent environ 60 % des réserves des banques centrales, contre 20 % pour les actifs en euros (cf. graphique 1). Le « privilège exorbitant » des Etats-Unis ne se résume pas seulement à la capacité du gouvernement américain à s’endetter à de faibles taux ; il se manifeste peut-être le plus clairement avec la capacité des petites et moyennes entreprises américaines à emprunter dans le reste du monde à des conditions avantageuses dont ne jouissent aucune de leurs consœurs étrangères.

GRAPHIQUE 1  Montant (en milliards de dollars américaines) et répartition (en %) des réserves de change des banques centrales

Le système de change en ce début de vingt-et-unième siècle

source : Ilzetzki et alii (2021b)

L’essor de l’euro comme devise internationale a été très limité (Ilzetzki et alii, 2021a). Selon certains indicateurs, la monnaie unique ne joue pas de plus grand rôle en dehors de l’Europe que les devises nationales qu’il a remplacées. Ces dernières décennies, avec l’émergence de l’économie chinoise, le renminbi est apparu comme un possible rival au dollar, mais pour l’instant il joue un rôle extrêmement limité. L’activité de prêt de la Chine à l’étranger a même renforcé, et non pas réduit, le rôle du dollar, dans la mesure où ces prêts sont très souvent libellés en dollars (Horn et alii, 2021). Dans tous les cas, même si le système international semble se configurer autour de deux ou trois blocs de devises, Ilzetzki et ses coauteurs doutent que le dollar soit rapidement détrôné comme principale devise internationale. L’Histoire montre que lorsqu’une monnaie est parvenue à s’établir au sommet de l’architecture financière internationale, elle tend à y rester durablement. Rares sont les changements de devise dominante et, lorsqu’ils surviennent, c’est au terme d’une longue transition.

Deuxièmement, alors que l’on avait tendance à considérer il y a deux décennies que chaque pays n’avait en définitive le choix qu’entre deux extrêmes, en l’occurrence le libre flottement de sa monnaie ou l’ancrage dur de celle-ci sur une autre devise, Ilzetzki et ses coauteurs notent que les régimes de change intermédiaires continent de dominer (cf. graphique 2). Ces derniers, allant de l’ancrage glissant (crawling peg) au flottement administré (managed floating), sont adoptés par 40 % des pays, représentant 50 % du PIB (Ilzetzki et alii, 2019). Ces dernières décennies, beaucoup de banques centrales sont massivement intervenues, en particulier pour contenir l’appréciation de leur monnaie. L’accumulation de réserves de change par les pays émergents a contribué, avec l’effondrement de l’inflation et de sa volatilité, à ce que les taux de change soient bien plus stables qu’à la fin du vingtième siècle. Alors que les effondrements du taux de change étaient fréquents durant les années 1990 et au début des années 2000, ils ont ensuite été bien plus rares. Cette tendance remet en cause l’idée répandue au tournant du siècle selon laquelle les régimes de change intermédiaires risquent de se solder par des crises de change.

GRAPHIQUE 2  Répartition des pays selon leur régime de change (en %)

Le système de change en ce début de vingt-et-unième siècle

source : Ilzetzki et alii (2021b)

Troisièmement, ces tendances dans la stabilisation des taux de chance se sont étendues au cœur même du système monétaire international. La volatilité du dollar américain, du yen, du deutschemark, puis de l’euro a régulièrement décliné au fil des décennies. Cette dynamique s’explique en partie par la coordination internationale, notamment les lignes de swap durant la crise financière mondiale, puis l’épidémie de Covid-19. Pour Ilzetzki et ses coauteurs, elle tient sûrement davantage au faible niveau et à la faible volatilité des taux d’inflation et des taux d’intérêt. 

Quatrièmement, la plupart des devises sont désormais convertibles et les contrôles de capitaux ont été graduellement retirés, tout d’abord dans les pays développés, puis dans les pays en développement. Notamment en conséquence de ce mouvement d’ouverture financière, le volume de flux de capitaux a explosé : fluctuant autour de 10 % du PIB mondial dans les années 1980, celui-ci a fortement augmenté à partir du milieu des années 1990 pour atteindre 25 % du PIB mondial en 2000, puis 45 % en 2007, avant de plonger avec la crise financière mondiale (cf. graphique 3). La libéralisation financière s’est poursuivie alors même que plusieurs travaux empiriques suggèrent que les afflux de capitaux étrangers peuvent finir par se révéler déstabilisateurs (Reinhart et Reinhart, 2008) et que les contrôles de capitaux peuvent être efficaces comme outils macroprudentiels (Ostry et alii, 2010 ; 2011). 

GRAPHIQUE 3  Flux de capitaux internationaux

Le système de change en ce début de vingt-et-unième siècle

source : Ilzetzki et alii (2021b)

Enfin, l’accumulation massive d’actifs sûrs, principalement libellés en dollars américains, s’explique en partie par les tentatives des banques centrales d’administration leur taux de change tout en maintenant la libre circulation des capitaux. Autrement, il s’agit d’une façon pour les banques centrales de gérer le « triangle d’incompatibilité » (ou « impossible trinité »).

GRAPHIQUE 4  PIB des Etats-Unis et réserves de change des banques centrales (en % du PIB mondial)

Le système de change en ce début de vingt-et-unième siècle

source : Ilzetzki et alii (2021b)

Cette accumulation de réserves de change, qui contribue à soutenir la demande mondiale d’actifs sûrs, en particulier de ceux libellés en dollars, fait peser sur le système international un risque similaire à celui observé par Robert Triffin (1960) dans le cas du système de Bretton Woods (Farhi et alii, 2011 ; Farhi et Maggiori, 2018). Aujourd’hui, environ la moitié des actifs sûrs dans le monde sont adossés sur la capacité budgétaire d’un unique Etat, en l’occurrence le gouvernement fédéral des Etats-Unis. Or, la demande d’actifs sûrs libellés en dollars a explosé et permis au gouvernement américain de s’endetter à de très bas taux d’intérêt, alors même que l’assiette fiscale sur laquelle ces actifs sont adoptés s’est érodée (cf. graphique 4). Les questions qui se posent aujourd’hui est de savoir, d’une part, si les Etats-Unis seront capables de continuer de convaincre les investisseurs financiers qu’ils disposent d’une capacité budgétaire suffisante pour soutenir leur endettement public et, d’autre part, si la demande d’actifs sûrs restera aussi forte qu’elle l’a été ces dernières décennies. Rien n’assure que l’économie mondiale restera indéfiniment au même équilibre (Farhi et Maggiori, 2018).

 

Références

FARHI, Emmanuel, Pierre-Olivier GOURINCHAS & Hélène REY (2011), Reforming the International Monetary System, CEPR.

FARHI, Emmanuel, & Matteo MAGGIORI (2018), « A model of the international monetary system », in Quarterly Journal of Economics, vol. 133, n° 1.

HORN, Sebastian, Carmen REINHART & Christoph TREBESCH (2021), « China’s overseas lending », in Journal of International Economics, vol. 133.

ILZETZKI, Ethan, Carmen M. REINHART & Kenneth S. ROGOFF (2019), « Exchange arrangements entering the twenty-first century: Which anchor will hold? », in The Quarterly Journal of Economics, vol. 134, n° 2.

ILZETZKI, Ethan, Carmen M. REINHART & Kenneth S. ROGOFF (2021a), « Why is the euro punching below its weight? », in Economic Policy, vol. 35, n° 103.

ILZETZKI, Ethan, Carmen M. REINHART & Kenneth S. ROGOFF (2021b), « Rethinking exchange rate regimes », NBER, working paper, n° 29347.

OSTRY, Jonathan D., Atish R. GHOSH, Karl HABERMEIER, Marcos CHAMON, Mahvash S. QURESHI & Dennis B.S. REINHARDT (2010), « Capital inflows: The role of controls », FMI, staff position note, n° 10/04.

OSTRY, Jonathan D., Atish R. GHOSH, Karl HABERMEIER, Luc LAEVEN, Marcos CHAMON, Mahvash S. QURESHI & Annamaria KOKENYNE (2011), « Managing capital inflows: What tools to use? », FMI, staff discussion note, n° 11/06.

REINHART, Carmen, & Vincent REINHART (2008), « Capital flow bonanzas: An encompassing view of the past and present », in J. Frankel & C. Pissarides (dir.), NBER International Seminar on Macroeconomics 2008.

TRIFFIN, Robert (1960), Gold and the Dollar Crisis: The Future of Convertibility, Yale University Press.

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