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18 avril 2016 1 18 /04 /avril /2016 17:53

Plusieurs pays émergents ont connu des arrêts soudains (sudden stops) dans les flux de capitaux au cours des années quatre-vingt-dix : le Mexique en 1994, les pays asiatiques en 1997, la Russie en 1998, le Brésil en 1999, etc. Après plusieurs années où ils bénéficièrent de larges entrées de capitaux, ces pays virent soudainement ces derniers se tarir, ce qui fit basculer leur pays dans une crise de change, une crise bancaire et une profonde récession. Ces dernières années ont également été marquées par un renversement des flux de capitaux à destination des pays émergents, ce qui a laissé craindre une résurgence des arrêts soudains. La croissance des pays émergents a ralenti, ce qui a pu être à la fois la cause et la conséquence de ce renversement des flux de capitaux. En outre, la Fed a pu déstabiliser les pays émergents en évoquant en 2012 un ralentissement (tapering) de ses achats d’achats, puis en resserrant sa politique monétaire, tout d’abord en réduisant effectivement ses achats d’actifs à partir de 2013 et en relevant ses taux directeurs fin 2015 [Eichengreen et Gupta, 2014 ; Basu et alii, 2014].

Moins optimistes que le FMI dans ses dernières Perspectives de l'économie mondialeBarry Eichengreen et Poonam Gupta (2016) ont analysé les arrêts soudains des flux de capitaux à destination des pays émergents depuis 1991. Ils identifient en l’occurrence 44 arrêts soudains dans leur échantillon de 34 pays depuis 1991. Ces épisodes durent en moyenne quatre trimestres. Les sorties de capitaux au cours des arrêts soudains représentaient en moyennent 1,5 % du PIB par trimestre, soit cumulativement 6 % du PIB pour l’ensemble de l’arrêt soudain, alors que les afflux de capitaux représentaient environ 1,7 % du PIB par trimestre au cours de l’année précédente. 

Eichengreen et Gupta comparent ensuite les divers épisodes qui se sont produits au cours de la période 1991-2002 avec ceux qui se sont produits au cours de la période 2003-2014. Ils montrent que la fréquence, la durée et sévérité des arrêts soudains sont restées les mêmes. Les arrêts soudains ont des répercussions tant financières que réelles. Ce sont d’abord des effets financiers qui se manifestent : le taux de change se déprécie, les réserves de change diminuent et les cours boursiers s’écroulent. Ensuite, la croissance du PIB ralentit, l’investissement diminue et le compte courant s’améliore. La croissance du PIB chute d’environ 4 points de pourcentage au cours des autres premiers trimestres d’un arrêt soudain. Par contre, le déclin du PIB est plus ample au cours de la seconde période analysée, ce qui reflète peut-être le fait que les afflux de capitaux au cours des trimestres qui précèdent l’arrêt soudain soient plus amples, mais aussi que le retournement des flux de capitaux soit plus fort au début de l’arrêt soudain.

En outre, l’importance relative des différents facteurs expliquant l’incidence des arrêts soudains a également changé au cours du temps. Les facteurs mondiaux, qui jouaient déjà un rôle majeur auparavant, semblent être devenus encore plus importants, en comparaison avec les caractéristiques et politiques spécifiques aux pays. En outre, les facteurs mondiaux qui se révèlent être les plus déterminants ne sont pas les mêmes qu’autrefois. Par exemple, au cours des années quatre-vingt-dix, ce sont surtout les hausses des taux directeurs de la Fed qui apparaissent les plus importants, en affectant l’offre de liquidité mondiale. Au cours de la décennie suivante, c’est l’indice VIX, constituant un indicateur mesurant l’aversion mondiale face au risque et la demande de liquidité, qui se révèle le plus important. En outre, les arrêts soudains tendent désormais à affecter différentes parties du monde simultanément, alors qu’auparavant ils avaient plutôt tendance à survenir dans une unique région à la fois, ce qui suggère à nouveau à Eichengreen et Gupta que les facteurs mondiaux ont gagné en importance.

Des cadres macroéconomiques et financiers plus robustes ont permis aux responsables politiques de répondre de façon plus flexible aux sudden stops. Pour autant, cette plus grande flexibilité ne garantit pourtant pas que ces pays soient préservés de ces événements ou que l’impact de ces derniers soit atténué. Au cours de la première période, les pays qui présentaient de larges déficits budgétaires et une forte inflation n’avaient pas d’autre choix que de resserrer leurs politiques budgétaire et monétaire. Au cours de la seconde période, les déficits budgétaires et l’inflation des pays affectés étaient en moyenne plus faibles. Les arrêts soudains compliquent toujours le financement des déficits et obligent les autorités à resserrer leurs politiques pour tenter de rassurer les marchés financiers. Plusieurs pays ont toutefois su récemment compenser le resserrement de la politique budgétaire par un assouplissement monétaire. Les désalignements de devises ont été moindres que par le passé et plusieurs banques centrales ciblent désormais l’inflation, ce qui leur a permis d’adopter une attitude plus permissive face à la dépréciation du taux de change qu’au cours de la première période. De plus larges réserves de change ont également permis aux autorités monétaires de rassurer les marchés quant à leur marge de manœuvre pour intervenir sur le marché des changes.

Le fait que les autorités publiques aient davantage de marge de manœuvre pour utiliser les politiques monétaires, budgétaires et de change face aux arrêts soudains pourrait suggérer que ces derniers affectent moins la production qu’auparavant, or ce n’est pas le cas. Le rythme annualisé des contractions de la production sont au moins aussi rapide qu’au cours de la première période. Cela suggère que quelque chose d’autre a changé et amplifié les répercussions sur la production, par exemple le volume et la composition des flux de capitaux internationaux, ou bien la prévalence ou l’impact des chocs externes. Au final, il apparaît que le renforcement des fondamentaux des pays a été compensé par le renforcement des chocs externes en provenance du reste du monde.

Eichengreen et Gupta évoquent enfin les diverses options (non pas incompatibles, mais complémentaires) qui s’offrent aux pays émergents dans la prévention des arrêts soudains. La première option, également avancée par le FMI ces dernières années, serait de limiter l’exposition aux flux de capitaux et aux chocs externes à travers l’instauration de barrières aux entrées de capitaux, sous la forme de taxes ou de règles plus strictes, qui réduiraient le volume et la volatilité des afflux de capitaux. Une seconde option serait de flexibiliser davantage la réponse des autorités publiques aux larges entrées des capitaux et à leur arrêt soudain, par exemple avec un plus grand assainissement des positions budgétaires, une plus grande flexibilisation des taux de change, un approfondissement des marchés financiers et une réduction des désalignements de devise. Une troisième option serait de mettre en place un système d’assurance financier contre les arrêts soudains : le FMI pourrait par exemple accorder des lignes de crédit, ou bien ces dernières pourraient être accordées à travers l'Initiative de Chiang Mai.

 

Références

BASU, Kaushik, Barry EICHENGREEN & Poonam GUPTA (2014), « From tapering to tightening: The impact of the Fed’s exit on India », Banque mondiale, policy research working paper, n° 7071, octobre.

EICHENGREEN, Barry, & Poonam GUPTA (2014), « Tapering talk: The impact of expectations of reduced Federal Reserve security purchases on emerging markets », Banque mondiale, policy research working paper, n° 6754.

EICHENGREEN, Barry, & Poonam GUPTA (2016), « Managing sudden stops », Banque mondiale, policy research working paper, n° 7639, avril.

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16 avril 2016 6 16 /04 /avril /2016 13:48

La hausse du chômage observée depuis la Grande Récession relève essentiellement du chômage conjoncturel, mais le chômage structurel semble également s’être accru, comme le suggère la courbe de Beveridge. Cette dernière désigne une relation inverse entre le taux de vacance d’emplois au taux de chômeurs (cf. graphique 1). Elle tire son nom de William Beveridge, qui avait noté en 1958 que le nombre d’emplois vacants diminuait à mesure que le chômage augmente, mais aussi que des postes étaient toujours vacants lorsque le chômage était élevé. En effet, lorsque l’économie subit une récession, les destructions d’emplois deviennent plus fortes que les créations d’emplois, si bien que le nombre d’emplois vacants diminue et que le nombre de chômeurs augmente [Mortensen et Pissarides, 1994]. A l’inverse, en période de reprise, le nombre d’emplois vacants augmente et le nombre de chômeurs diminue. Ainsi, à mesure que le cycle d’affaires se déroule, on tend à se déplacer le long de la courbe de Beveridge.

GRAPHIQUE 1  La courbe de Beveridge

Comment expliquer les déplacements de la courbe de Beveridge ?

Toutefois, la courbe de Beveridge peut elle-même se déplacer. En l’occurrence, elle s’éloigne de l’origine lorsque l’appariement entre l’offre et la demande de travail se dégrade. Autrement dit, l’éloignement de la courbe de Beveridge correspond à une détérioration du chômage structurel, ou tout du moins de sa composante frictionnelle : pour un nombre donné d’emplois vacants, le nombre de chômeurs augmente ou bien, pour un nombre de chômeurs donné, le nombre d’emplois vacants augmente. Il peut y avoir inadéquation (mismatch) entre les offres d’emploi et les travailleurs aussi bien en termes de type de métier ou en termes de niveau de qualification qu’en termes de situation géographique. Des tendances lourdes, comme le progrès technique ou la mondialisation qui entraînent des chocs de réallocation et un processus de destruction créatrice, peuvent contribuer à accroître le chômage d’inadéquation. Lorsqu’une récession se prolonge, les effets d’hystérèse peuvent contribuer à transformer le chômage conjoncturel en chômage structurel : par exemple, plus travailleurs restent longtemps au chômage, plus ils perdent en compétences et en motivation, moins ils deviennent employables, plus ils sont susceptibles de rester piégés au chômage, voire de sortir de la population par découragement. Autrement dit, le cycle d’affaires ne conduirait à seulement à des déplacements sur la courbe de Beveridge, mais contribuerait également à déplacer celle-ci [Blanchard et Diamond, 1989]. En observant la période entre 1951 et 2000, Peter Diamond et Ayşegül Şahin (2014) constatent que les épisodes de détérioration de l’appariement aux Etats-Unis coïncident avec les récessions. En outre, certains mettent l’accent sur le rôle ambigu des institutions du marché du travail, en affirmant que celles-ci conduiraient à freiner la baisse du chômage lors des reprises malgré l’accélération des créations de postes [Blanchard et Wolfers, 2000]. Par exemple, selon la théorie de la prospection d’emploi (job search), la générosité du système d’indemnisation du chômage peut elle-même inciter les chômeurs à rechercher moins activement un emploi et à accroître leur salaire de réservation, c’est-à-dire à accroître le niveau de salaire en-deçà duquel ils refusent un emploi. Ou encore, le renforcement des procédures d’embauche et de licenciement, ainsi que la plus forte taxation du travail, peuvent désinciter les entreprises à embaucher malgré leurs besoins en main-d’œuvre.

La hausse du chômage observée depuis la Grande Récession relève essentiellement du chômage conjoncturel, mais le chômage structurel semble également s’être accru, comme le suggère les évolutions de la courbe de Beveridge dans de nombreux pays développés. Par exemple, Boele Bonthuis, Valerie Jarvis et Juuso Vanhala (2015) ont observé les déplacements de la courbe de Beveridge de l’ensemble de la zone euro à long terme (cf. graphique 2). Ils constatèrent qu’elle s’est éloignée de l’origine à la fin des années quatre-vingt-dix, puis qu’elle s’est rapprochée de l’origine au milieu des années deux mille, puis qu’elle s’en est à nouveau éloignée à partir de la crise financière mondiale. Bien sûr, les évolutions de la courbe de Beveridge ont été hétérogènes d’un pays-membre à l’autre au cours de la Grande Récession : par exemple, elle s’est éloignée de l’origine en Espagne, en France et en Grèce, tandis qu’elle s’en est rapprochée en Allemagne.

GRAPHIQUE 2  Evolution de la courbe de Beveridge de la zone euro

source : Bonthuis et alii (2015)

Elva Bova, João Tovar Jalles et Christina Kolerus (2016) ont analysé les conditions et politiques économiques susceptibles d’affecter l’appariement entre la demande et l’offre de travail. Ils identifient les déplacements des courbes de Beveridge pour 12 pays de l’OCDE entre le premier trimestre 2000 et le quatrième trimestre 2013 en utilisant trois méthodologies complémentaires. Ils constatent que la croissance de la population active et la réglementation de la protection de l’emploi réduisent la probabilité d’un déplacement vers le nord-est de la courbe de Beveridge. Ils constatent aussi que le processus d’appariement est d’autant plus difficile que la part des salariés avec des niveaux intermédiaires d’éducation dans la population active est élevée, que la part des jeunes parmi les chômeurs est faible, que la part des travailleurs âgés dans le chômage est élevée et que le chômage de long terme est important. Bova et ses coauteurs estiment que les politiques qui facilitent l’appariement sur le marché du travail, c’est-à-dire qui rapprochent la courbe de Beveridge de l’origine, incluent les politiques actives, telles que les incitations à créer les entreprises et les programmes de partage du travail. Ils constatent en outre que la protection de l’emploi est négativement corrélée avec le chômage frictionnel. En effet, un resserrement de la protection du travail réduit la rotation (turn-over) de la main-d’œuvre et par là l’activité de recherche d’emploi. Par contre, un accroissement du coin fiscal, des cotisations sociales et des allocations chômage contribuerait au contraire à dégrader le processus d’appariement, donc à éloigner la courbe de Beveridge de l’origine.

 

Références

BLANCHARD, Olivier, & Peter A. DIAMOND (1989), « The Beveridge curve », in Brookings Papers on Economic Activity, vol. 1.

BONTHUIS, Boele, Valerie JARVIS & Juuso VANHALA (2013), « What’s going on behind the euro area Beveridge curve(s)? », BCE, working paper, n° 1586.

BONTHUIS, Boele, Valerie JARVIS & Juuso VANHALA (2015), « Shifts in euro area Beveridge curves and their determinants », Banque de Finlande, working paper, n° 2015-2.

BOVA, Elva, João Tovar JALLES & Christina KOLERUS (2016), « Shifting the Beveridge curve: What affects labor market matching? », FMI, working paper, n° 16/93.

BLANCHARD, Olivier, & Justin WOLFERS (2000), « The role of shocks and institutions in the rise of European unemployment: the aggregate evidence », in Economic Journal, vol. 110, n° 462.

DIAMOND, Peter A., & Ayşegül ŞAHIN (2014), « Shifts in the Beveridge curve », Federal Reserve Bank of New York, staff report, n° 687.

MORTENSEN, Dale T., & Christopher A. PISSARIDES (1994), « Job creation and job destruction in the theory of unemployment », in Review of Economic Studies, vol. 61.

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9 avril 2016 6 09 /04 /avril /2016 10:10

Les mouvements nets de capitaux vers les pays émergents ont ralenti depuis 2010 et toutes les régions en ont été affectées (cf. graphique). Ces événements se sont produits dans le contexte d’un ralentissement dans les pays émergents et, ensuite, d’un resserrement de la politique monétaire de la Réserve fédérale.

GRAPHIQUE  Entrées nettes de capitaux dans les pays émergents (en % du PIB) et nombre de crises de la dette

Pourquoi les pays émergents sont-ils plus résilients face au reflux des capitaux que par le passé ?

source : FMI (2016)

Cette dynamique est d’autant plus inquiétante que, par le passé, les ralentissements des entrées de capitaux après des expansions soutenues de l’activité ont souvent été associés à des crises très coûteuses pour les économies et beaucoup d’entre eux ont souvent coïncidé avec une réorientation de la politique monétaire dans les pays développés. Ne serait-ce qu’au cours de ces dernières décennies, le monde émergent a connu deux de ces épisodes : tout d’abord entre 1981 et 1985, puis entre 1995 et 2000. Ces deux épisodes ont été marqués par la crise de la dette de plusieurs pays en développement au début des années quatre-vingt, par la crise tequila du Mexique en 1994, par la crise asiatique de 1997 qui toucha tout particulièrement la Corée du Sud, l’Indonésie et la Thaïlande, ou encore par la crise turque en 2000. Au milieu des années quatre-vingt-dix, lorsque les banques et les grandes entreprises d’un pays émergent, par exemple la Thaïlande, empruntaient, elles le faisaient en dollars américains [Taylor, 2016]. Elles convertissaient ces dollars en devise local (par exemple le baht, dans le cas de la Thaïlande) et prêtaient et dépensaient dans cette dernière. Une telle pratique semblait sûre car le pays avait un régime de change fixe : les autorités thaïlandaises veillaient à ce que la parité entre le dollar et le bath soit constante ou, tout du moins, qu’elle ne varie que très peu. Avec les entrées de capitaux, les prix d’actifs et le crédit ont pu connaître une forte expansion, contribuant un temps à soutenir l’activité économique. Or, lorsque les entrées de capitaux finirent par s’interrompre brutalement, le taux de change se dépréciait, si bien que les entreprises et les banques qui avaient emprunté en dollars et accordé des prêts libellés en bath se retrouvèrent incapables de rembourser leur dette : c’est le « péché originel » (original sin). L’arrêt soudain (sudden stop) des entrées de capitaux provoquèrent alors un effondrement des prix d’actifs et du crédit, faisant basculer l’économie dans une sévère récession.

La perspective que de tels enchainements destructeurs puissent se reproduire aujourd’hui est d’autant plus effrayante que les pays émergents contribuent aujourd’hui à une plus grande part de la production mondiale et des échanges internationaux qu’au cours des deux précédents épisodes : entre 1980 et 2014, la part du PIB mondiale réalisée par les pays émergents est passée de 21 à 36 %, tandis que la part des échanges mondiaux qu’ils réalisent est passée de 27 % à 44 %. Autrement dit, l’économie mondiale est aujourd’hui bien plus sensible aux évolutions touchant les pays émergents que par le passé.

Dans les dernières Perspectives de l’économie mondiale du FMI, Rudolfs Bems, Luis Catão, Zsóka Kóczán, Weicheng Lian et Marcos Poplawski-Ribeiro (2016) se sont alors penchés sur un échantillon d’une quarantaine de pays émergents. Ils ont alors constaté que c’est à la fois une réduction des entrées de capitaux et un accroissement des sorties de capitaux qui ont contribué à ce ralentissement et que l’essentiel du déclin des entrées de capitaux peut s’expliquer par la réduction des écarts de croissance entre les pays émergents et les pays avancés : les investisseurs financiers se sont tout d’abord inquiétés des perspectives de croissance plus sombres pour les pays émergents, mais la perspective du resserrement de la politique monétaire américaine a notamment joué un rôle, notamment lors de l’épisode du tapering. Les pays qui présentaient des régimes de change relativement flexibles en 2010 ont connu de larges dépréciations de leur devise au cours de cette période. Le ralentissement dans les entrées nettes de capitaux a été de taille comparable en termes d’ampleur aux ralentissements majeurs des années quatre-vingt et quatre-vingt-dix. Pour autant, l’incidence des crises de dette externe dans l’épisode actuel a été jusqu’à présent moindre que par le passé (cf. graphique).

Pour Bems et ses coauteurs, les évolutions sont davantage cohérentes avec le traditionnel triangle des incompatibilités qu’avec le simple dilemme d’Hélène Rey. En effet, plusieurs facteurs ont contribué à ce que l’actuel ralentissement des mouvements de capitaux soit moins pernicieux, en particulier les améliorations apportées à la politique économique et le cadre dans lequel elle s’exerce. En particulier, l’adoption de régimes de change plus flexibles a contribué à ce que les devises se déprécient de façon ordonnée, ce qui a atténué les effets du cycle mondial des flux de capitaux sur plusieurs pays émergents. Les dépréciations peuvent en effet contribuer à soutenir la consommation, l’emploi et la production, ce qui atténue les répercussions de la crise sur l’économie domestique. Les pays émergents ont également détenu davantage d’actifs étrangers, notamment davantage de réserves étrangères (en premier lieu, des dollars). La part de leur dette externe libellée en devise étrangère est aussi moindre que par le passé, ce qui les a préservés du « péché originel ».

 

Références

BEMS, Rudolfs, Luis CATÃO, Zsóka KÓCZÁN, Weicheng LIAN & Marcos POPLAWSKI-RIBEIRO (2016), « Understanding the slowdown in capital flows to emerging markets », in FMI, World Economic Outlook: Too slow for too long, avril.

REY, Hélène (2013), « Dilemma not trilemma: The global financial cycle and monetary policy independence », présenté à Jackson Hole, 24 août.

TAYLOR, Timothy (2016), « Global capital flows: Why no crisis (so far) this time? », in Conversable Economist (blog), 8 avril.

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